Réalisé par Zahra A. et Célène D.
Cette collection est composée de deux tenues inspirées du livre « L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau » écrit par Olivier Sacks, c’est le cas d’un marin qui a perdu le sens du réel et du temps et qui est persuadé d’avoir 19 ans alors qu’il en a 49. Il alterne entre un état psychotique où il vit dans un mensonge et des moments où il est conscient de son environnement et de son identité. C'est ce passage, cette transformation perpétuelle entre plusieurs états, qui a inspiré ces tenues interactives teintées de nostalgie. Cette collection nous plonge dans une boucle temporelle grâce à des vêtements intelligents et autonomes qui s'adaptent à leur environnement.
Les robes sont fabriquées à partir d’une base en organza sur lesquelles sont fixées des petites caméras et récepteurs, qui sont reliés à un nano-ordinateur chargé de rassembler les informations sur l’environnement de la personne qui porte la tenue, avant de traiter ces données et de les transmettre et à des petits aimants qui à l’aide de silicone, de verre et de PVDF, vont faire bouger la matière. Ces vêtements sont donc entièrement autonomes.
Les matières employées sont intelligemment choisies pour mettre en valeur les différents changements qui se reflètent facilement grâce à l'iridescence de l'organza et du plastique, mais aussi pour refléter la texture aqueuse de l'eau.
La première tenue consiste en une sorte de bulle protectrice qui coupe celui qui est à l’intérieur, du monde extérieur l’enfermant dans sa propre réalité. Cette bulle peut dans son mouvement devenir presque étouffante. Les plis qui se forment font penser à de la peau qui se tend et détende à l'instar d'une peau qui se fripe avec les effets de l'âge.
La deuxième tenue est plus organique et pourrait presque faire penser, avec ses replis rose, à un cerveau humain, lui aussi en changement constant puisque le patient alterne entre des phases psychotiques et un retour au réel. Cette tenue a plus un but de camouflage, tel un caméléon qui s'adapte à son environnement et qui se cache qu’une réelle protection.
Ces robes sont sensibles au spectre chromatique, elles réagissent en se rétractant ou bien en se dépliant en fonction des couleurs qui l’entourent, ressemblance flagrante avec le caméléon, inspiration pour cette collection. L’utilisation d’une matière aussi légère que l’organza permet au système d’aimants de faire bouger le tissu facilement et visiblement. Ces aimants étant déclenchés grâce à des caméras et récepteurs capables de saisir les données concernant les couleurs de l’environnement, de le transmettre à un ordinateur, qui va, en fonction des informations reçues déclenchés plus au moins de récepteurs.
Ainsi la robe n’est jamais stable et est toujours en constant changement, permettant une infinité de variations. Les vêtements servent de miroir et renvoient concrètement ce qu’ils voient.
"Non seulement les robes interagissent avec les personnes autour d’elles, mais aussi, en particulier, avec leurs environnements ce qui fait que le corps humain n’est plus au centre de mes projets " a affirmé Ying Gao.
Les robes n’ont pas pour but de mettre en avant le corps mais plutôt de le camoufler, l’artiste elle-même a qualifié cette collection de caméléon liquide. Les tenues, toujours en perpétuel changement sont d’une complexité infinie car de part leur adaptation à leur environnement immédiat, la disposition et la façon dont les robes mouvent est donc toujours unique reflétant l'intrication du psychisme humain. Bien que proche du corps et avec des jeux de transparence les tenues gardent une sorte de naïveté parfois oppressante.
Ce projet interactif de Ying Gao marque donc le lancement de ses premières pièces totalement autonomes qui n’ont besoin de rien pour fonctionner toutes seules. Cette collection se définit par ses courbes douces, ses jeux de transparence et cette teinte de nostalgie et tristesse perceptible. Nous avons ici tenté de représenter le sentiment que doivent éprouver les mannequins : tristesse et solitude certes, mais aussi une certaine bulle de calme et sérénité. On s’y sent comme le patient de Olivier Sacks, coupé du monde et flottant entre deux mondes : notre imaginaire et la réalité.
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